Le verfügbar aux enfers
Humour, dérision, détournement lui permettent de raconter l'Enfer dans lequel ces femmes se trouvent, avec une distance salutaire, et de lui substituer un Enfer d'opérette, en référence à L'Orphée aux Enfers d’Offenbach.
Cette opérette dont le ton vif et léger pourra surprendre répondait à un besoin aussi impérieux que les autres besoins élémentaires. En cela elle reste fidèle à l’engagement que Germaine Tillion avait pris en entrant dans la résistance « …nous pensons que la gaîté et l’humour constituent un climat intellectuel plus tonique que l’emphase larmoyante. Nous avons l’intention de rire et de plaisanter et nous estimons que nous en avons le droit, car nous sommes engagés corps et bien dans l’aventure nationale… »
Le rire et le chant deviennent des armes contre l’entreprise de déshumanisation qu’est le système concentrationnaire. En affirmant la vie dans l'antre même de sa négation, Germaine Tillion nous livre ici un acte de résistance.
Elle a observé, collecté, consigné, décrit et analysé le système concentrationnaire ; elle a eu cette audace d'inverser les termes du rapport de domination : de surveillée elle s'est faite surveillante, de victime soumise elle est devenue active observatrice.
Comme le Naturaliste, personnage grotesque d'anthropologue qu’elle a inventé "pour l'occasion", Germaine Tillion dissèque le Verfügbar, "cette nouvelle espèce zoologique… apparenté aux gastéropodes, car il a l’estomac dans les talons" et "produit de la conjugaison d’un gestapiste mâle avec une résistance femelle".
L'adaptation que nous proposons renforce la choralité du texte mais aussi son caractère subversif : l’impertinence face à l’oppression, le chant et le rire comme