Les liaisons dangereuses
– ce que le personnage confie ici à Valmont concerne une véritable discipline, manifeste dans le champ lexical de l'étude et de l'effort qui organise tout le passage : "règles, principes, réflexions, ouvrage, réfléchir, tâchais, travaillée, travail, science"... Au rebours d'une éducation sentimentale, il s'agit ici de l'apprentissage du paraître et de l'hypocrisie.
– les termes du regard et de l'apparence sont pour cela dominants : "attention, yeux, regard, air, physionomie, expression, observais, coup d'œil"... Ces propos de la marquise se comprennent mieux en effet par rapport à une société mondaine où les individus sont toujours en représentation et donc susceptibles de livrer aux autres des témoignages de faiblesse. Il s'agit ainsi d'apprendre à mentir pour satisfaire à son orgueil et à son exigence de liberté. Ce souci est particulièrement décuplé chez Mme de Merteuil, qui n'imagine la vie sociale qu'en termes de lutte.
Mais il s'agit dans tous les cas d'une lutte intellectuelle où les victoires sont savourées en silence. La duplicité, présentée ici comme un art de vivre, vient enrichir les jugements sommaires ou platement moralisateurs que pourrait inspirer le personnage. Héroïne de la volonté, Mme de Merteuil tire sa grandeur des masques qu'elle oppose cyniquement à la comédie mondaine où le regard de l'autre est une menace constante d'aliénation. Sadien, le personnage est aussi sartrien dans la construction hautaine de sa liberté.
• L'étude pourra ensuite analyser le "culte du moi" revendiqué par cette lettre fondamentale :
– on repère des traces manifestes d'orgueil dans l'opposition constante entre le "je" (parfois rehaussé du "moi seule" ou du "moi-même") et le groupe social, significativement désigné ici par les indéfinis ("on", "les uns, les autres");
– cet orgueil est sensible aussi dans le mépris pour les autres, et particulièrement pour les femmes sensibles ou