Pouvoir constituant dérivé et contrôle du respect des limites
Norme fondamentale, la constitution se doit d’être stable. Cette stabilité ne signifie pas immuabilité ou intangibilité du texte. Au contraire, la constitution ne peut être pérenne qu’à condition qu’elle admette des adaptations ponctuelles. Autrement dit, la rigidité des constitutions écrites ne doit pas exclure une certaine dose de plasticité. Ce « seuil de malléabilité » peut objectivement se mesurer à la marge de manœuvre dont dispose le pouvoir de révision, c'est-à-dire à la nature et à l’intensité des limites, textuelles ou autres, qui lui sont imposées. Si on considère que ces limites sont les dispositions constitutionnelles, de forme ou de fond, qui bénéficient d’une « immunité » et qui, à ce titre, ne peuvent être l’objet de révision, un certain nombre de questions surgissent. Car si on postule que le pouvoir constituant est souverain, comment accepter que celui-ci soit limité ? Sous cet angle, la marque de la souveraineté du pouvoir constituant ne résiderait-elle pas, paradoxalement, dans le franchissement possible des limites plus que dans leur respect ? Et pour autant, ne doit-on pas admettre que les limites constitutionnelles ne sont pas des atténuations de la souveraineté du constituant puisque s’appliquer des normes que l’on s’est données n’est pas renoncer à sa souveraineté mais bien l’exercer ? 1 On le voit, la présence de limites à l’exercice du pouvoir constituant dérivé, dont Locke, Rousseau mais surtout Siéyès 2 ont systématisé l’existence, interroge sur l’étendue de sa compétence. Interrogation d’autant plus légitime si on admet que le respect de ces limites doive être assuré par le juge. Ainsi, en aval, le contrôle juridictionnel du franchissement des limites par le constituant dérivé suppose, en amont, l’identification des limites imposées par le constituant originaire. De l’utilité (I) découle l’effectivité des limites (II).
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Dans ce sens voir S. RIALS, R.D.P., 1984, pp.