Quel(s) regard(s) porter sur la décennie révolutionnaire ?
La Révolution française a été également source de conflits d’interprétation au sein de l’historiographie française. Elle constitue donc aussi un enjeu de débats scientifiques voire politiques. Pour certains historiens, que l’on pourrait rattacher à une tradition sinon marxiste, jacobine, la Révolution fut si riche, si puissamment porteuse d’idéaux égalitaires qu’elle constitue un bloc unit, indivisible. Pour eux, la Révolution française dans son ensemble, et même dans ses aspects aberrants, doit être considéré comme un modèle universel. D’autres historiens, de tradition libérale et dans un esprit plus critique, voient dans la Révolution une expérience unique par rapport aux expériences anglaises et américaines. Pour eux, la Révolution française, libérale et élitaire à l’origine, est une période où la politique prend la place du sacré, du religieux. Cette situation va entraîner la création d’un espace politique nouveau, propre au libéralisme politique. Mais, peu à peu, la Révolution va dériver vers un modèle autoritaire qui atteint son paroxysme en 1793 avec la Terreur.
Ce bref exposé montre que les enjeux de l’interprétation de la décennie révolutionnaire se situent autour du positionnement vis-à-vis de deux grandes lignes de fractures qui divisent l’historiographie française : la nature du mouvement révolutionnaire et la question de la radicalisation de celui-ci. En quoi ces lignes de fractures divisent l’historiographie française et définissent deux façons d’interpréter la décennie révolutionnaire ?
Alors que l’histoire sociale voit dans la lutte des classes les origines et l’explication de la Révolution,