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TEXTE
Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J'ai reçu un télégramme de l'asile: «Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués.» Cela ne veut rien dire. C'était peut-être hier. L'asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d'Alger. Je prendrai l'autobus à deux heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J'ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n'avait pas l'air content. Je lui ai même dit : "Ce n'est pas de ma faute." II n'a pas répondu. J'ai pensé alors que je n'aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n'avais pas à m'excuser. C'était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c'est un peu comme si maman n'était pas morte. Après l'enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle.
L’incipit: Du début à « officielle. »
Problématique: En quoi ce début dévoile à la fois le titre de l’œuvre et l’œuvre elle-même ?
I. Un incipit déroutant
A) Où? Quand ? Comment ?
- Traitement des lieux : Alger (l. 8). Paysage gommé, purement narratif. Le lieu est explicitement désigné « Marengo », mais c’est au lecteur de déduire que le personnage se situe à quelques heures d’autobus de cet endroit, à Alger. C’est la seule indication temporelle de ce passage.
- Traitement du temps : Pas de moments antérieurs à l'histoire, le passé est dans le flou. On n'a pas vraiment d'avant. Par exemple, on annonce l'enterrement de sa mère mais on ne sait pas de quoi elle est morte. L'avenir va jusqu'à demain voire après-demain, il est extrêmement limité. On a le sentiment d'une quasi-simultanéité de la narration et de son contenu. Meursault raconte les faits les uns après les autres comme dans un