l engagement précoce
Un corps. Un corps sec. Un corps sec et chétif. Un regard. Un regard perçant. Un regard perçant de dandy au caractère bien trempé. Léon-Gontran Damas avait fait du bégaiement une poésie engageante. Lorsqu'on évoque la négritude, ce courant né sur les rives de la Seine dans les années 1930, son nom est étroitement associé à celui de ses deux compères : le Sénégalais Léopold Sédar Senghor et le Martiniquais Aimé Césaire. Mieux, il est le premier à avoir publié, en 1937, un recueil de poèmes,Pigments, somme de tous les combats menés par cette jeunesse venue des colonies. Pourtant, au fil des années, beaucoup s'étonnent de le voir évoluer dans l'ombre de ses deux amis et considèrent qu'il n'a jamais été reconnu à sa juste valeur. Mais cette idée ne fait pas l'unanimité. D'aucuns voient en cette affirmation un cliché de plus, sans aucun lien avec la réalité. C'est le cas de l'écrivain guadeloupéen Daniel Maximin, pour qui « Césaire et Senghor sont surtout connus pour leur action politique. Cela ne signifie pas qu'on a plus lu Ferrements de Césaire ou les Élégies de Senghor que Black Label de Damas. Il était très connu à son époque. La poésie reste la poésie. Ce n'est pas une question de tirage, ni de niveau. Damas est là. C'est le plus important. » Et comme disait Senghor, dans la France des années 1930 où les jeunes Noirs et métis venus des colonies étaient en quête de leur identité, « Damas fut le premier écrivain engagé ».
C'est à Cayenne que Léon-Gontran Damas vient au monde, le 28 mars 1912, en même temps qu'une soeur jumelle. À sa façon toute poétique, dans son recueil Black Label, il peindra beaucoup plus tard ainsi ses origines :
« Sur la terre des parias un premier homme vint sur la Terre des Parias un second homme vint sur la Terre des Parias un troisième homme vint