Nul homme ne devrait être juge, juré et bourreau. Ce précepte, ligne directrice du système pénal, dicte la séparation des pouvoirs et des procédures, du moment de l’inculpation à l’exécution de la peine du coupable. Pourtant, dans Dix Petits Nègres, le principe est rompu. Le juge Wargrave se substitut tout au long de l’œuvre à toutes les institutions du système judiciaire. Il devient une représentation vivante et complète de la justice humaine. À ce titre, il devient le médium dont se sert Agatha Christie pour en souligner les dangers.
La démarche du juge Wargrave est de punir les criminels. La mission qu’il se donne est noble : faire justice au nom de ceux qui ne le peuvent plus. Pourtant, les moyens qu’il emploie pour y parvenir sont contraires à la définition traditionnelle de la justice. La justice de Lawrence Wargrave va donc prendre des allures de vengeance préméditée alors qu’il punit les responsables d’homicides par la mort – une loi du Talion qu’il exécute par procuration au nom de victimes.
À un moment, le Juge évoque la confidence qu’un médecin lui a faite : « Et il me cit