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L'effacement énonciatif dans les discours représentés et ses effets pragmatiques de sous- et de sur-énonciation
Alain Rabatel
IUFM de Lyon, GRIC, Université de Lyon 2, UMR CNRS 5612, France
Ce travail vise la mise en relief de stratégies variées d'effacement énonciatif (EE) dans les discours représentés (DR) et des effets pragmatiques qu'elles induisent. Il s'agit là d'un objectif particulièrement ambitieux, de par sa nature a priori aporétique. Selon Vion, l'EE constitue une stratégie, pas nécessairement consciente, permettant au locuteur de donner l'impression qu'il se retire de l'énonciation, qu'il "objectivise" son discours en "gommant" non seulement les marques les plus manifestes de sa présence (les embrayeurs) mais également le marquage de toute source énonciative identifiable. Plusieurs cas de figure sont alors possibles:
- Faire jouer au langage une fonction purement descriptive selon laquelle il se contenterait de constater et de relater les dispositions d'un monde tel qu'il serait sans l'intervention d'un sujet parlant. Cette disposition particulière peut faire penser à la notion d'énonciation historique par laquelle Benveniste opposait "histoire" à "discours".
- Construire un énonciateur abstrait et complexe, comme celui qui prendrait en charge un proverbe, un slogan publicitaire, un texte de loi, un article non signé de journal.
- Construire un énonciateur "universel" comme celui qui prendrait en charge un discours scientifique ou théorique. On peut, à la limite, considérer que ces ceux derniers cas de figure pourraient être regroupés. (Vion 2001: 334)
Quant à Charaudeau, il envisage dans sa Grammaire du sens et de l'expression une seconde forme d'EE, dans le champ des discours rapportés, sous une forme restée programmatique jusqu'à ce jour:
Le sujet parlant s'efface de son acte d'énonciation, et n'implique pas l'interlocuteur.
Il témoigne de la façon dont les discours du monde (le tiers)