Freud. hypothèse de l'inconscient
Tous les philosophes, ou presque, affirment, depuis Aristote (384-322 av. J.-C.) et Descartes (1596-1650), que l’homme est un être pensant, un être de raison, un être capable de se comprendre et de se maîtriser. En ce sens, l’hypothèse d’un inconscient psychique heurte profondément la tradition philosophique. Pour les philosophes, la pensée s’identifie à la conscience, et il ne peut y avoir de pensée qui ne soit consciente, ce serait alors une pensée non pensée ! Faut-il dès lors remettre en cause le sérieux de l’hypothèse formulée par Freud (1856-1939) ? Cette hypothèse n’est-elle que pure supposition, pure fantaisie ? Freud s’en défend, et dans le texte que nous nous proposons d’étudier il affirme que c’est une hypothèse nécessaire, légitime et prouvée. Nous chercherons ici à examiner attentivement les arguments qui justifient chacune de ces affirmations. Pourquoi l’hypothèse de l’inconscient est-elle nécessaire ? En quoi est-elle vraiment légitime ? Est-elle réellement prouvée ? Admettre qu’elle est prouvée, c’est admettre que la psychanalyse est effectivement une science, comme le pense Freud. Qu’en est-il ? Quelle est précisément la valeur épistémologique de la psychanalyse ? C’est ce sur quoi nous nous proposerons de réfléchir après avoir procédé à l’étude précise du texte.
Commençons tout d’abord par examiner pourquoi, selon Freud, cette hypothèse est nécessaire. « Elle est nécessaire, nous dit-il, parce que les données de la conscience sont extrêmement lacunaires ; aussi bien chez l'homme sain que chez le malade, il se produit fréquemment des actes psychiques qui, pour être expliqués, présupposent d'autres actes qui, eux, ne bénéficient pas du témoignage de la conscience ». Nous pouvons noter que le mot « nécessaire » est un terme ambiguë ; est nécessaire ce qui est utile, ce qui sert et qui répond à un besoin ; mais le terme « nécessaire » désigne aussi ce qui ne peut pas ne pas