La cinquieme promenade jean jacque rousseau
Afin de mieux saisir cette nature ambiguë de la rêverie entrevue dans notre analyse de la « Première Promenade », nous aimerions maintenant nous attarder à décrire la progression et la variation de la rêverie au fil des Promenades. En jetant un regard rapide sur les Rêveries, on peut apercevoir une certaine similitude entre les dix Promenades de Rousseau, qui se dessinent à peu près toutes de la même façon : à partir d’un événement donné (un accident, une lecture, un geste, une parole, etc.), Rousseau prend conscience d’actions et d’opinions opaques, inconscientes ou irréfléchies chez lui et, au fil de sa Promenade, il cherche à comprendre le sens et l’ampleur de ces actions ou opinions afin de mieux se connaître et de mieux agir. Rousseau traite ainsi de son rapport à la connaissance et à l’écriture de soi dans la Première ; à la douleur et à la mort dans la Deuxième ; à la sagesse et à l’ignorance dans la Troisième ; à la vérité et au mensonge dans la Quatrième ; au bonheur dans la Cinquième ; aux bienfaits dans la Sixième ; à la botanique et à la nature en général dans la Septième ; à l’amour-propre et à l’amour de soi dans la Huitième ; au plaisir et à l’éducation dans la Neuvième ; et à l’amour dans la Dixième, opérant à chaque fois un mouvement d’introspection et un examen de sa position dans le monde[20]. Malgré cette apparente proximité entre les différentes Promenades, la plupart des commentateurs des Rêveries ont cependant pris l’habitude, en quelque sorte, de les hiérarchiser selon la part qu’elles donnent à la rêverie ; hiérarchie au sommet de laquelle trône la « Cinquième Promenade »[21]. Dans les paragraphes qui suivent, nous tenterons donc de retracer le parcours de cette Promenade.
À première vue, la « Cinquième Promenade » ne semble pas faire exception au schéma général des Rêveries signalé plus haut, car Rousseau part d’une situation donnée — ici, les habitations où il a vécu au