L'ANALYSE STRATEGIQUE
Toute présentation de l'analyse stratégique butte toujours sur la même complexité. Cette théorie s'appuie sur trois concepts clés étroitement imbriqués et fortement interdépendants, le pouvoir, l'acteur stratégique et le système d'action concret. Comme il est impossible de présenter ces concepts en parallèle, un choix s'impose, qui réduira nécessairement les caractéristiques systémiques de l'ensemble. Nous avons décidé de passer du local au global, du pouvoir au système en passant par l'acteur, afin de mettre en évidence le caractère structurant du concept de pouvoir car celui-ci nous accompagnera tout au long de cette thèse.
Le pouvoir
Réfléchir sur l'organisation en tant que champ politique impose d'opérationnaliser le concept de pouvoir. La réflexion sur le pouvoir hante l'analyse sociale depuis toujours, mais la transformation d'une idée en un concept opérationnel n'est pas nécessairement aisée. Le pouvoir fait souvent figure de catégorie fourre-tout où l'on range l'ensemble des influences sociales dont on ne parvient pas à percevoir l'origine. Ainsi, des individus ou des groupes seraient les dépositaires d'une propriété mystérieuse qui leur permet d'agir sur les autres, comme par magie. La grande force de l'analyse stratégique est d'être parvenue à dépasser cette solution de facilité pour donner du pouvoir une représentation objectivable

Cette transformation du concept est rendue possible par le déplacement analytique du lieu d'origine du pouvoir. Le pouvoir ne peut se concevoir comme attribut d'une personne ou d'un groupe ; il est propre à la relation entre deux acteurs. La possibilité pour A de faire agir B comme il l'entend ne dépend pas des caractéristiques personnelles de A ; elle découle des propriétés de la relation entre A et B. Dans ces conditions, parler du pouvoir de A n'a de sens que si l'on a défini B et la relation qui les lient. Les acteurs ne sont pas porteurs de pouvoir, si bien que A peut avoir beaucoup de pouvoir