Nedjma, kateb yacine
« Au sein de la perturbation, éternel perturbateur », Kateb Yacine publie en 1956 Nedjma, œuvre de combat pour « reconquérir l’Algérie par la littérature »(Jeannine Hayat). L’Algérie violée, meurtrie, que l’on tente d’étreindre enfin. L’étoile insaisissable, fuyante, à l’image de Nedjma fantasmée. L’écriture katebienne, celle du fragment, tente d’embrasser l’unité dans le fond de son propos et dans sa forme, dans un monde fracturé et disloqué. Ainsi André Rousseaux affirme : « Je ne connais guère d’ouvrages où le langage d’un écrivain serve à rompre plus hardiment avec nos rythmes habituels ». Kateb Yacine dérange, déconstruit, défait les conventions littéraires : il déplace voire détruit les frontières des genres ; choisit la circularité et la réitération plutôt que la linéarité ; morcelle son texte hybride en fragments, faisant naître une écriture saccadée, haletante.
En quoi le texte de Kateb Yacine est-il le manifeste d’un refus d’une écriture guindée ?
A travers une écriture de la rupture, il met en effet en place la déconstruction. Il ouvre ainsi un espace à peupler qui donne sens à l’absence, et qui seul permet de laisser vivre la création libre.
Kateb Yacine, réfractaire, livre une œuvre qui torture non seulement lois et conventions littéraires mais également son récit lui-même.
Nedjma est une œuvre hybride qui déconstruit le genre romanesque, rompant avec ses lois et conventions. En tant que genre institué, il est castré : le schéma narratif est bouleversé (les situations initiale et finale n’étant pas clairement définies, notamment : les repères chronologiques sont brouillés et la lecture n’est pas motivée par la fin comme dans les canons littéraires), le récit amputé : « j’avais à peu près reconstitué le récit que Rachid ne me fit jamais jusqu’au bout (…) ; se taisant ou se reprenant » (p89). Ce sont des «