Suis je le maitre de mes pensées ?
By Baptiste
La propriété a d'abord un sens purement juridique. M'appartient ce que l'on m'a vendu en vertu d'un contrat en bonne et due forme. Mais tout l'ensemble de ces biens que je possède, en ce sens que j'en suis le propriétaire légal, rien ne m'en garantit une possession durable. Je peux à tout moment en être dépouillé. Ma richesse est à la merci d'un revers de fortune. Et quoi qu'il arrive, tout bien matériel est forcément périssable, à plus ou moins longue échéance. Je finirai par en être dépossédé. Donc ces biens ne sont miens que de façon contingente, et non nécessaire. Quant à mon corps, il semble que l'on puisse lui appliquer la même réflexion. Il est mortel. Il peut subir une mutilation, rien ne m'assure de le conserver dans son intégrité, il est à la merci d'une violence ou d'une maladie. De plus, il est offert au pouvoir des autres qui peuvent l'entraver dans ses mouvements, par exemple l'enchaîner. L'esclave n'est pas maître de son corps. Mais, si mon corps n'est pas entièrement dépendant du pouvoir de ma volonté, en revanche, ma volonté, elle, semble m'appartenir, au même titre que toutes les facultés ou les dons de mon esprit. Personne ne peut contraindre ma pensée. Elle n'est pas un bien extérieur, mais ce que j'ai de plus intime. Ma pensée, du moins, semble réellement à moi. Cependant, cette assurance que j'éprouve de posséder ma pensée n'est-elle pas trompeuse? Quand je reprends sans réfléchir les paroles d'autrui, ou lorsque je répète un lieu commun, puis-je dire que ma pensée est mienne? Or, j'ai nécessairement des préjugés. Tout homme a d'abord été enfant et a eu des tuteurs, dont il a reçu une éducation qui va l'influencer, peut-être à son insu. Si ma pensée dépend tellement de ce que les autres en ont fait, peut-on dire encore qu'elle est mienne? Mais si même ma pensée ne m'appartient pas de façon absolue, alors, qu'est-ce qui est à moi?
De tous les biens matériels que je possède légalement, aucun