C’est un homme bien. Mais il est d'un égoïsme insupportable. Il revient de son travail et s'allonge dans le canapé devant la télé. Je rentre aussi de mon travail, mais j'arrive à la maison deux heures plus tard, et, chargée comme une mule avec les courses de l'hypermarché. Je vais à la salle, lui crie dessus, l'insulte, gesticule mes bras en l'air, casse un ongle. Lui, ne bronche même pas. Alors, je m'assois sur une chaise dans la cuisine et me mets à pleurer. Après un certain temps il apparaît, dans des chaussettes : "Qu'est-ce qu'il y a pour dîner ?", demande-t-il avec sa voix la plus innocente. Je respire un grand coup pour lâcher un discours haineux, mais il m'intercepte avec une habileté née d'années de pratique : "Je sais, je vais te préparer une salade dont tu me diras des nouvelles", s'exclame-t-il avec visage de garnement. Cette salade d'avocats, de noix et la pomme qui lui plaît tant. Donc je me calme parce que je suis idiote et bien qu'en ronchonnant, je l'aide à sortir les plats, le fruit, les couteaux, et lui attache le tablier dans le dos tandis qu'il maintient les bras de manière pompeuse, étendues devant lui comme s'il était un chirurgien sur le point de réaliser une opération magistrale à cœur ouvert. Alors il commence à éplucher les avocats et moi, pour faire quelque chose, je lave et coupe la laitue, hache les oignons, casse et divise les noix, sépare deux pommes en petits cubes. Je le regarde par le coin de l'œil et il continue d'éplucher. De façon à ce que je tire les pommes de terre, les nettoie, les lave, les coupe finement pour qu'elles soient comme elles lui plaisent; je prends la poêle, jette