Cas pratique droit pénal
Cass crim 1er mars 1989 : note de la revue de science criminelle 1990
Pierre Bouzat, Doyen honoraire de la Faculté des sciences juridiques et économiques de Rennes ; Président de l'Institut international des sciences criminelles Dans une affaire qui a fait l'objet d'un arrêt de la Chambre criminelle du 1er mars 1989 (JCP 1989. IV. 186, Gaz. Pal. 1er et 2 nov. 1989, Somm. p. 17, note J.-P. Doucet), un nommé A. détenait, du fait de ses activités professionnelles au sein de l'entreprise E., des documents comptables qu'il avait utilisés pour établir des tableaux et des graphiques relatifs à ces activités. Il les avait ensuite sciemment communiqués à M., à l'insu de son employeur, lors de rencontres à son domicile personnel, sachant que M. effectuait une mission d'étude et de prospection en vue de la création d'une entreprise concurrente. La cour de Pau, dans un arrêt du 30 mars 1988 (inédit), le condamna pour vol, en déclarant qu'il avait « usurpé la possession de ces documents, et avait bien commis la soustraction frauduleuse visée à la prévention, les données comptables et commerciales figurant sur les documents et transmises à un tiers constituant des biens incorporels qui se trouvaient être juridiquement la propriété exclusive de l'entreprise E. ».
La défense présenta des moyens d'une extrême faiblesse, en déclarant que : « l'arrêt attaqué n'avait retenu, comme élément matériel du délit de vol, que le fait d'avoir communiqué des renseignements que la cour qualifiait elle-même de biens incorporels, sans caractériser la soustraction frauduleuse entraînant l'interversion de possession d'une chose matérielle, seule constitutive du délit ; d'autre part, l'arrêt attaqué n'aurait pas caractérisé l'intention frauduleuse, élément intentionnel indispensable à la caractérisation du délit de vol ».
Il y a longtemps que jurisprudence et doctrine déclaraient possible le vol de biens incorporels (V. notamment, Merle et Vitu, Droit pénal spécial, éd.