Deux définitions de l'anarchie : kropotkine et malatesta
« On ne le dira jamais assez, l'anarchisme, c'est l'ordre sans le gouvernement ; c'est la paix sans la violence. C'est le contraire précisément de tout ce qu'on lui reproche, soit par ignorance, soit par mauvaise foi » . Cette réflexion de l'anarchiste belge Hem Day a le mérite de mettre en exergue l'ambiguïté qui plane sur la pensée anarchiste. En effet, il est frappant de voir comment ses détracteurs se sont ingéniés à confondre ce mouvement complexe avec l'anomie, sorte de chaos social dans lequel le plus fort exerce sa liberté aux dépens du plus faible. Or, quiconque ouvrant un livre de ces théoriciens - parfois très fins - relèvera aisément leur aspiration à une vie paisible. C'est dans cet état d'esprit qu’Élisée Reclus pourra intituler son Discours à la séance solennelle de rentrée du 22 octobre 1895 de l’Université Nouvelle de Bruxelles : « l'anarchie est la plus haute expression de l'ordre ». C'est dans un contexte, le XIXe siècle, de croissance économique quasi - unique dans l'Histoire, tirée par les révolutions industrielles qu'apparaît l'anarchisme (courant de philosophie politique développée sur un ensemble de théories et pratiques anti - autoritaires) au milieu d'un foisonnement intellectuel d'idéologies parfois révolutionnaires. Notons bien qu'une infime partie de la population récolte les fruits de ce fantastique développement technique puis économique alors que l'immense majorité survit tant bien que mal à une indéfectible misère. Hugo ou Zola sont les racines de Marx ou Proudhon. Certaines anarchies (car il est plus propre d'en parler au pluriel) en sont très proches, c'eût été le cas de Kropotkine (1842 1921) avant sa rupture avec les socialistes en 1907 , alors que d'autres s'en dissocient à des degrés divers : « La liberté sans le socialisme est le privilège et l'injustice, le socialisme sans la liberté l'esclavage et la brutalité » Michel Bakounine. Tout un éventail de tendances