Droit des obligations
La maturité du droit des obligations dans l’Europe du droit commun (circa 1200 - ca. 1800)
Introduction
Reprenant les leçons des juristes romains, les matériaux retrouvés dans les livres de Justinien et surtout les méthodes employées par les juristes classiques, appliquant en particulier le principe de l’autonomie scientifique du droit, les juristes européens entre le XIIIe et le XVIIIe siècle ont élaboré un droit auquel on a donné le nom de jus commune, le droit commun. On l’a appelé aussi dans l’histoire du droit français le « droit romano-canonique » parce qu’il est constitué principalement par le droit romain et le droit canonique. On dit aussi l’utrumque jus, ce qui veut dire l’un et l’autre droit. Cet Utrumque jus est un des caractères principaux de la civilisation médiévale, a-t-on écrit le (J. L. Gay, Mélanges Le Bras, II, p. 1191), mais il dépasse la durée du Moyen Age pour se prolonger dans les derniers siècles de l’Ancien-Régime. Cette période extraordinairement féconde, comparable par son importance à celle qui a présidé au droit romain classique, est fondée sur le principe essentiel de l’autonomie scientifique du droit, une méthode qui avait déjà donné des fruits féconds dans la Rome classique. A ce propos, je vous invite à lire le beau livre d’Aldo Schiavone, IUS, l’invention du droit en Occident, paru à Paris en 2008 dans sa traduction française. Pas seulement pour nourrir ce cours et celui de droit romain ; mais pour votre culture juridique dans son ensemble. Aldo Schiavone distingue avec clarté la tradition politique et la tradition juridique : la tradition politique vient de la Grèce ; elle privilégie la lex. La tradition proprement juridique vient de Rome ; elle se fonde sur le jus. C’est cette tradition de l’autonomie scientifique du droit que le Moyen Age classique a cultivée et qui s’est prolongée. Le premier qui a mis en valeur la persistance du Droit romain au Moyen Age est le juriste allemand,
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Savigny, Histoire du Droit