Etat d'exception
Par Mohamed Ridha Jenayah Professeur à la Faculté de droit de Sousse
Pour décrire la nature des rapports qui se sont instaurés entre le droit administratif, entendu comme la branche du droit public dont l’objet est de soumettre les autorités exécutives au respect des règles du droit, et la constitution, qu'on définira sommairement ici comme la norme suprême de tout système juridique censée régler les rapports politiques au sein de l'Etat, je choisirai une métaphore tirée du titre d'un roman sulfureux paru à la veille de la Révolution française.
Dire que cette liaison est dangereuse me semble en effet tout à fait conforme à notre propos, car on ne peut se rapprocher sans risques de cet objet de tous les désirs politiques qu'est la constitution.
Un tel rapprochement paraît cependant inéluctable et cela au moins pour deux raisons:
La première est d'ordre interne; elle procède du libre choix du droit administratif: dés lors que celui-ci a fini par reconnaître que les normes constitutionnelles, au même titre que les lois et les règlements, constituent une source de la légalité il ne pouvait se refuser à les interpréter.
La deuxième est d'ordre externe; elle est le résultat d'un choix qui dépasse le droit administratif et qui est en rapport avec la création d'un Conseil constitutionnel chargé du contrôle de la constitutionnalité des projets de lois en 1989. A partir du moment où ce Conseil a été appelé à interpréter les projets de lois portant sur le champ administratif à la lumière de la constitution, les « avis motivés », publiés et ayant autorité sur « tous les pouvoirs publics » qu’il va rendre ne seront pas sans conséquences sur le mode de production des normes en droit administratif. Il en résulte une inféodation du droit administratif et une sorte de « constitutionnalisation (rampante) du droit administratif ».
Ce sont