Phedre act iii scene 3
PHEDRE, OENONE
OENONE
Il faut d'un vain amour étouffer la pensée,
Madame. Rappelez votre vertu passée :
Le roi, qu'on a cru mort, va paraître à vos yeux ;
Thésée est arrivé, Thésée est en ces lieux.
Le peuple pour le voir court et se précipite.
Je sortais par votre ordre, et cherchais Hippolyte,
Lorsque jusques au ciel mille cris élancés...
PHEDRE
Mon époux est vivant, Oenone, c'est assez.
J'ai fait l'indigne aveu d'un amour qui l'outrage ;
Il vit ; je ne veux pas en savoir davantage.
OENONE
Quoi ?
PHEDRE
Je te l'ai prédit, mais tu n'as pas voulu.
Sur mes justes remords tes pleurs ont prévalu.
Je mourais ce matin digne d'être pleurée ;
J'ai suivi tes conseils, je meurs déshonorée.
OENONE
Vous mourez ?
PHEDRE
Juste ciel ! qu'ai−je fait aujourd'hui ?
Mon époux va paraître, et son fils avec lui.
Je verrai le témoin de ma flamme adultère
Observer de quel front j'ose aborder son père,
Le coeur gros de soupirs qu'il n'a point écoutés,
L'oeil humide de pleurs par l'ingrat rebutés.
Penses−tu que sensible à l'honneur de Thésée
Il lui cache l'ardeur dont je suis embrasée ?
Laissera−t−il trahir et son peuple et son roi ?
Pourra−t−il contenir l'horreur qu'il a pour moi ?
Il se tairait en vain. Je sais mes perfidies,
Oenone, et ne suis point de ces femmes hardies
Qui goûtant dans le crime une tranquille paix,
Ont su se faire un front qui ne rougit jamais.
Je connais mes fureurs, je les rappelle toutes.
Il me semble déjà que ces murs, que ces voûtes
Vont prendre la parole, et prêts à m'accuser,
Attendent mon époux pour le désabuser.
Mourons. De tant d'horreurs qu'un trépas me délivre.
Est−ce un malheur si grand que de cesser de vivre ?
La mort aux malheureux ne cause point d'effroi ;
Je ne crains que le nom que je laisse après moi.
Pour mes tristes enfants quel affreux héritage !
Le sang de Jupiter doit enfler leur courage ;
Mais, quelque juste orgueil qu'inspire un sang si beau,
Le crime d'une mère est un