Utopie et liberté
Les différentes dimensions de la vérité (conformité, vérification, impartialité, authenticité) peuvent donner l’illusion qu’il suffirait de "rétablir le sens des mots" comme le voulait Confucius, rejoignant une idéologie scientiste et logiciste, où les problèmes bien posés et un langage bien employé permettrait un accord et une certitude supprimant tout conflit. Pourtant dans ce monde objectif (psychotique en fait) il n’y a plus de nécessité d’échange, de rapports humains, plus d’existence individuelle, plus de liberté humaine. Pourtant l’homme c’est la liberté. L’arbitraire du langage, sa polysémie, sa capacité de tromper (errare humanum est) sont donc essentiels aux rapports humains, à la parole qui ne se réduit pas du tout à la communication. C’est parce que l’accord intersubjectif n’est pas donné que chaque individu, chaque citoyen dans une démocratie, a une valeur absolue. Un mot désigne seulement une réalité avant de la connaître, ainsi des mots vérité ou liberté. Distinguer leurs modalités ne doit pas faire disparaître l’unité du concept derrière sa diversité. La liberté est bien inséparable de l’erreur et de la confusion mais aussi de la culpabilité et de l’inconscient. Cette liberté est ce qui donne consistance à la vérité elle-même, à son surgissement comme histoire, à l’homme en tant que question et projet, désir qui ne se réalise qu’à la fin. C’est l’essence de la philo-sophie elle-même (comme de la démocratie), l’insuffisance de tout savoir qui livre l’avenir à notre liberté (c’est par cet impossible que la vérité tient au réel). Dieu s'il connaît l'avenir n'est pas libre, c'est pour cela qu'il n'ex-siste pas.
Ce qui fait l'unité de la vérité est le faux, l'erreur, le risque qui ouvrent un espace de liberté, de balancement, de choix où l'être se révèle à nous comme possibilités et nous concerne, nous importe dans l'urgence (au contraire des habitudes et conduites mécaniques désertées par la pensée). C'est