Commentaire d’arrêt de la chambre criminelle du 19 février 1959

« Nul ne peut se faire justice à soi-même ». Ce vieil adage juridique traduit tant l’évolution qu’a subi le droit français et notamment le droit pénal. Si le corollaire est effectivement l’abolition de la vengeance ou encore de la justice privée, il est des cas prévus par le Code pénal pour lesquels on peut se soustraire de ce principe et ainsi agir de notre propre chef pour remplacer l’action publique quand elle fait défaut. En effet, les faits justificatifs sont de ces cas, prévus par la loi, qui permettent la réaction à une agression sans médiation. Merle et Vitu de les définir de la façon suivante : ce sont des « circonstances objectives, indépendantes de la psychologie du délinquant qui désarment la réaction sociale contre l’infraction pénale ».

La légitime défense en l’occurrence est un fait justificatif qui, légalement prévu, a servi en l’espèce de moyen de défense au propriétaire d’une habitation qui s’était défendu, arme à feu aidant, contre l’intrusion de nuit par un tiers qui souhaitait rendre visite à une gouvernante pour laquelle il était épris. Plus précisément, cet agresseur nocturne, manifestement en état d’ivresse, s’étant vu refuser l’accès à la propriété tenta d’y entrer par effraction malgré les vaines tentatives du propriétaire de l’enjoindre à y renoncer. C’est alors que ce dernier, une fois muni de son revolver chargé et positionné à la fenêtre du premier étage, tira vers la supposée position du perturbateur, qui, alors que posté derrière un buisson était occupé à fumer, s’est trouvé grièvement blessé, le poumon perforé.

La Cour d’appel a rejeté le moyen de défense susmentionné, à savoir les articles 328 et 329 de l’ancien Code pénal relatifs à la présomption de légitime défense suite à l’introduction nocturne dans un lieu habité. Suite au rejet, le propriétaire se pourvoit en cassation pour violation de l’article 329 par la Cour d’appel, qui selon lui donnait à ce