Abus de confiance et abus de biens sociaux

Laurent Godon, Docteur en droit

L'essentiel
En modifiant la définition de l'abus de confiance, le nouveau Code pénal semble avoir élargi le domaine de l'infraction. La nouvelle rédaction ne permet-elle pas alors d'inclure les cas d'abus de biens sociaux puisque après tout l'incrimination spéciale des articles 425 et 437 de la loi du 24 juillet 1966 n'est qu'une variété de l'abus de confiance adaptée au droit des sociétés commerciales ? Il est donc utile de faire le point sur les rapports entre les deux types de qualifications capables de réprimer les abus de gestion des dirigeants de sociétés, pour éventuellement parvenir à établir que le fondement même de l'incrimination spécifique est désormais dépassé.

Or, si les éléments de la définition et le domaine des deux notions en cause paraissent coïncider, l'existence de régimes juridiques très proches, mais ponctuellement différenciés, semble pour l'heure empêcher une assimilation totale des deux qualifications et le retour de l'incrimination spéciale dans la sphère de l'infraction de droit commun.

Dans ces conditions on peut regretter qu'une dualité assise sur des différences seulement techniques subsiste, d'autant que ce qui justifiait l'instauration d'une incrimination spécifique n'existe plus vraiment aujourd'hui où la nouvelle définition de l' abus de confiance peut englober celle d'abus de biens sociaux. Il convient alors de se demander si le retour à une unicité de qualification ne serait pas opportun et de s'interroger sur les effets d'une telle évolution sur la condition des dirigeants de sociétés.

1. - Modification du domaine de l'incrimination d'abus de confiance. L'abus de confiance est défini par le nouveau Code pénal comme « le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un