Jurisprudence perruche
Dominique CARTRON
Avocat au Barreau de Rennes
Spécialisé en Réparation du Préjudice Corporel
L e droit moderne de la responsabilité médicale a connu, dans le secteur de la médecine libérale sa première révolution avec l’arrêt « Mercier » du 9 mai 1936, rangeant durablement la relation entre le médecin et son patient dans un cadre contractuel. Cet arrêt, fondateur de toutes les évolutions futures, imposait au médecin une obligation de moyens (le médecin doit tout doit faire pour parvenir à la guérison, mais il n’y est pas contraint) par référence aux données de la science à l’époque des soins. Rien de notable dans les cinq décennies suivantes, ne viendra bouleverser cette orientation nouvelle. La jurisprudence sera peu abondante et réservera au médecin une justice compréhensive eu égard à la difficulté de l’art médical.
La décennie 1990-2000 sera marquée par une évolution radicale sous l’impulsion de trois facteurs. Le premier est d’ordre sociologique. La société française a connu une poussée consumériste dont la traduction législative a permis l’émergence d’un véritable droit de la consommation durant les deux décennies précédentes. Le patient n’a pas échappé à cette évolution des mentalités et est devenu, lui aussi, un consommateur. Avec le second facteur, la médecine a été victime de son succès. Alors qu’elle devenait de plus en plus performante, ses erreurs lui ont été plus difficilement pardonnées. Enfin, certaines affaires, comme celle du sang contaminé, celle des hormones de croissance, ont fortement entamé son image. Ces trois facteurs ont induit plus de recours devant les tribunaux, provoquant ainsi une diversification de la jurisprudence qu’un nombre jusque-là réduit d’espèces ne permettait pas.
L’évolution, purement prétorienne, va être radicale. En 1992[1], le Conseil d’État abandonnera l’exigence de la faute lourde en médecine hospitalière. En 1993[2], la Haute Juridiction