La cour suprême des etats unis
La Constitution de 1789 et l’arrêt Marbury v Madison de 1803 font de la Cour Suprême des EUA (Supreme Court Of The United States – SCOTUS) la matrice du pouvoir judiciaire et la placent ainsi au cœur des institutions du pays. Sommet de la hiérarchie judiciaire et instance de contrôle de constitutionnalité des lois, la Cour Suprême semble bien s’inscrire dans le régime de séparation stricte des pouvoirs qu’est le régime présidentiel américain en tant qu’elle est un organe indépendant et souverain dans l’exercice d’une double fonction d’application et de contrôle des lois votées par les représentants du peuple. La Cour Suprême serait ainsi l’équivalent de nos Conseil d’Etat, Cour de cassation et Conseil constitutionnel réunis.
Cependant, forte de ses prérogatives attribuées par la Constitution et par l’histoire du droit américain, elle s’est construite comme une instance dont les jugements capables de court-circuiter les deux autres pouvoirs remettent en question un régime présidentiel dans lequel elle jouit d’un statut particulier : elle suscite la méfiance à ses débuts, entretient parfois le fantasme et nourrit dès lors les accusations de « gouvernement des juges ». Au regard du nombre d’affaires qu’elle traite chaque année (une petite centaine), les maux que l’on lui attribue et le pouvoir qu’on lui prête peuvent certes paraître déraisonnables, néanmoins ils soulèvent la question de la place réelle occupée par la Cour Suprême dans les institutions américaines. Dans quelle mesure s’inscrit-elle dès lors dans la pratique du régime présidentiel américain ?
Si elle exerce de jure une fonction de contre-pouvoir unique, attribuée par la Constitution et issue l’histoire juridique des EUA, elle exerce également de facto un pouvoir moins perceptible sur les institutions et la société civile.
I. Un pouvoir exercé de jure, dans les limites définies par la Constitution
A. « La nature de ses droits, l’espèce de ses justiciables »