la gestion de l'urgence
DE L'URGENCE EN GESTION
L'urgence ressemble à une drogue: stimulante et même nécessaire à dose modérée, elle peut entraîner de dangereuses accoutumances et devenir hautement toxique.
Mais c'est un phénomène très peu étudié jusqu'ici...
PAR C. RIVELINE
Professeur à l''Ecole des Mines de Pans
LE SILENCE DES LIVRES
L'urgence est omniprésente dans la ville des affaires et totalement ignorée des théories des organisations. Pourtant, tous les auteurs prennent acte de la formidable accélération des choses (déplacements, flux d'informations, changements de tous ordres) dans ces dernières décennies, au point qu'Alvin Toffler. dans son Choc du futur (1). y voit l'essence même de la modernité. Toutes les enquêtes sur la vie des chefs d'entreprises d'aujourd'hui (cf. notamment
H. Mintzberg (2) et J.L. Delpeuch et A. Lauvergeon (3)) mettent en avant le fait qu'ils se sentent perpétuellement débordés.
Mais accélération et surmenage ne suffisent pas à qualifier l'urgence. Cette
notion suggère en effet un manque de temps, un état de crise, un décalage entre deux durées, celle dont on souhaiterait disposer et celle dont on dispose. Or. beaucoup d'accélérations sont bénéfiques, une fois passée la période d'apprentissage: on n'entend plus guère de critiques contre les calculettes, le minitel ou le TGV. Par ailleurs, le fait que le chef travaille trop à son gré n'entraîne pas nécessairement qu'il travaille plus mal que s'il avait tout son temps.
Les auteurs les plus connus en matière de gestion des entreprises
(P.R. Lawrence et J.W. Lorsch (4). H. Mintzberg (5) et T. Peters et R. Waterman (11), par exemple) indiquent les formes d'organisation les plus adaptées pour faire face à un monde qui change vite: accentuer la spécialisation et la flexibilité pour être au plus
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ANNALES DES MINES - MARS 1991
EN QUETE DE THEORIES près du client et du produit, favoriser les communications informelles pour se concerter sans