NIETZSCHE
ŒUVRES : Le gai savoir
Introduction théorique sur la vérité et le mensonge au sens extra-moral
L’antéchrist
Par delà le bien et le mal
Ainsi Parlait Zarathoustra
LA MORALE , LES VALEURS DE LA SOCIÉTE DISPARAISSENT, LAISSANS L’HOMME SANS REPÈRE
Toutes les morales défendues jusqu’à présent ont consisté à nier la vie. L’exemple type d’une telle morale négatrice de la vie est la morale chrétienne, qui se prolonge en Europe sous forme de socialisme, d’anarchisme, de bouddhisme, de libéralisme, etc. La morale chrétienne invente tout un « arrière-monde » fictif (l’au-delà) au nom duquel elle réprime durement la vie. L’éloge de la souffrance et du sacrifice de soi, la condamnation de l’égoïsme, la répression de la sexualité et du plaisir, la valorisation des passions tristes, tout dans le christianisme vise à réprimer la santé et la vie. Le socialisme prolonge cette morale sur le plan économique, et l’anarchisme sur le plan politique (le socialisme est d’ailleurs censé déboucher, dans la théorie marxiste, sur la disparition de l’Etat). Le bouddhisme est la nouvelle religion susceptible de séduire les Européens, car il exprime le même déni de la vie par son invitation à renoncer au désir. Enfin, le libéralisme, qui peut sembler s’opposer aux doctrines précédentes, n’est jamais qu’un autre moyen de parvenir aux mêmes effets, à savoir le « bonheur du plus grand nombre », en accord avec la philosophie morale des utilitaristes anglais. Nietzsche voit dans toutes ces morales l’expression du nihilisme, c’est-à-dire la tendance de la vie à se nier elle-même, un déclin et régression de la puissance de l’esprit.
Pourtant, cette morale de la négation n’a pas existé de tout temps, et elle n’est pas la seule morale possible. Nietzsche distingue une morale des faibles et une morale des forts. Les forts, les dominants, les aristocrates, ont d’abord inventé les valeurs et la morale. Est bon, selon cette morale, ce qui est noble, digne, élevé, loyal, etc. Tout ce qui n’est