Droit civil
« Les juges de la Nation ne sont que la bouche qui prononce les paroles de la loi ». Cette citation de Montesquieu, philosophe français des Lumières, pose très clairement les limites du rôle du juge. Ces dernières sont confirmées au regard du Code civil par les articles 4 et 5, qui y occupent une place de choix.
Ces articles édictent à l’encontre du juge deux prohibitions, celle de le contraindre à statuer même quand la loi est imparfaite et celle du refus de sa prétention à être législateur et donc à créer le droit affirmant ainsi la modestie de son rôle. C’est pour cette raison que ces articles régissant l’office du juge se trouvent dans le Code civil alors qu’a priori on pourrait considérer leur localisation légitime dans le Code de procédure civile.
Au lendemain de la Révolution Française, les quatre rédacteurs du Code civil, en 1804, s’efforçant de prévenir les dérives de l’Ancien Régime et ainsi éviter le retour du juge comme clé de voute du système juridique ont rédigé ces deux articles : l’article 4 empêchant le juge de fuir sa mission et le suivant l’empêchant d’abuser de cette dernière.
Si le juge est forcé de statuer même en l’absence de la loi, dans quelle mesure peut-il juger s’il est limité dans cette action ? D’autre part, si le juge a le pouvoir d’interpréter les lois, n’est-il pas par la même une source du droit ?
Pour répondre à ce paradoxe et à ces différentes interrogations, dans un premier temps, nous mettrons en évidence la contradiction apparente du devoir du juge à travers l’article 4 et 5 du Code civil (I), puis dans un second temps nous montrerons que ces derniers constituent un binôme manifeste (II).
I/ Les articles 4 et 5 : une contradiction apparente
En vertu de l’article 4 du Code civil, le juge doit suppléer les « silences, obscurités et insuffisances de la loi », cette disposition met en lumière le devoir et le pouvoir d’interprétation du juge (A). A cette prérogative