CÉLINE - Voyage au bout de la nuit

Incipit
« Ça a débuté comme ça...T'es un anarchiste et puis voilà tout ! »
L'incipit du Voyage...préfigure par la virulence de l'expression d'une écriture, qui se pense novatrice, une dénonciation de la guerre avec le caractère aléatoire de l'engagement du personnage principal, Bardamu.

Situer le passage

Ce début de roman énergique surprend par sa manière d'exhiber les rouages de l'incipit tout en les récusant. C'est une discussion d'une banalité confondante qui va engendrer la trame romanesque. Bardamu se laisse guider par son élan vital ; on peut déjà signaler ici l'influence des écrits autour de la psychanalyse ; par défi envers Arthur Ganate, personnage qui se révélera insignifiant dans l'amplitude de l'histoire mais essentiel sur sa portée.

Questions

L'incipit nous amènera à nous questionner sur :

A. Ce qui en fait, ou non, un incipit au sens traditionnel du terme

B. L'expression d'une vision négative du monde

C. Le registre lyrique mais « crasse » d'une écriture « moderne »

Analyse

Le premier point à dégager concerne l'apparente déconstruction de l'incipit traditionnel propre à la conception romanesque de Céline, sauf qu'à l'époque du Voyage... son style reconduit encore des codes propres aux romans dits « classiques ».

A.
Nous avons encore affaire à la création d'un cadre référentiel très réaliste avec :
- une temporalité précise, « après le déjeuner », avec un contexte historique particulier qui se met en place, « le Président Poincaré »
- un climat chaud vu l'allusion aux « oeufs à la coque »
- le lieu qui est Paris, « Place de Clichy »
- la mise en avant d'un narrateur/personnage dès la deuxième phrase. L'expression « Moi, je » appuie sur sa présence, son individualité très marquée. Nous sommes dans une narration interne qui permet le phénomène d'identification.
La première fausse piste créée par Céline réside dans l'impression donnée de faire d'Arthur Ganate le personnage